Élections haïtiennes 2026 : entre scepticisme populaire et pression étrangère.
- ISEMANA JÉRÔME
- Oct 14
- 2 min read
Port-au-Prince, octobre 2025
À moins de cinq mois de l’échéance fixée pour organiser des élections générales en Haïti, le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) peine à convaincre. Entre attentes citoyennes, tensions internes et injonctions diplomatiques, le pays s’avance à pas incertains vers un scrutin censé marquer le retour à l’ordre constitutionnel.
Dans les rues de la capitale, le mot « élections » suscite plus de soupirs que d’espoir. Dix-huit mois après sa mise en place, le Conseil Présidentiel de Transition n’a toujours pas installé de Conseil Électoral Provisoire ni défini de calendrier clair. Pourtant, l’accord politique du 3 avril 2024 est formel: le scrutin doit avoir lieu avant le 7 février 2026.
Un organe collégial sous pression
Composé de neuf membres issus de secteurs religieux, politiques et sociaux, le CPT incarne une tentative de gouvernance partagée dans un pays privé de président élu depuis juillet 2021. Officiellement, sa mission est de préparer les conditions nécessaires à des élections libres et transparentes. Mais les dissensions internes, les retards administratifs et l’absence de communication publique nourrissent la défiance. Plusieurs membres du comité ont exprimé, en coulisses, leur frustration face à l’inertie du processus.
Sécurité, logistique, légitimité : les trois verrous
Le pays est confronté à une triple impasse. D’abord sécuritaire, car, selon les estimations de l’ONU, plus de 80 % de Port-au-Prince est sous contrôle de groupes armés. Ensuite logistique puisqu' aucun organe électoral n’est opérationnel et les ressources financières restent floues. Enfin politique du fait que la légitimité du CPT est contestée par une partie de la société civile qui dénonce un manque de transparence et d’inclusivité dans les décisions.
La société civile réclame des garanties
« La transition ne peut réussir sans une participation active de la société civile et une transparence totale dans les décisions», a déclaré Marie-Laurence Jocelyn Lassègue, ancienne ministre et militante, lors d’un forum citoyen à Pétion-Ville. Plusieurs organisations communautaires et universitaires appellent à une campagne d’éducation civique, à des garanties de sécurité pour les électeurs et à une feuille de route claire. Le silence prolongé du CPT sur ces points alimente la méfiance.
Une pression diplomatique croissante
Sur le plan international, les partenaires d’Haïti multiplient les rappels à l’ordre. L’accord du 3 avril, soutenu par Washington, Bruxelles et l’ONU, engage les signataires à mettre fin à la violence et au chaos. Mais cette pression, si elle vise à éviter un vide institutionnel prolongé, soulève aussi des critiques. « On ne peut pas imposer un calendrier électoral à un pays en crise sans résoudre les causes profondes de l’instabilité », confie un diplomate en poste à Port-au-Prince.
Une échéance qui ne négocie pas
À mesure que les semaines passent, le CPT se retrouve pris entre deux feux : répondre aux exigences d’un peuple en quête de légitimité démocratique et satisfaire les attentes d’une communauté internationale soucieuse de stabilité. Mais dans un pays où les institutions chancellent et où la peur dicte les déplacements, le temps, lui, ne négocie pas. Et le 7 février approche sans bruit mais avec gravité








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